Berthold Bartosch, L'Idée (1932)

Film de 25 minutes, réalisé en 1932 en France, grâce à la technique du papier découpé, l'Idée est le seul film achevé de Berthold Bartosch.

Vous trouverez ici des informations sur le réalisateur, le film et son contexte. 

Qui est Berthold Bartosch ?

Berthold Bartosch est un réalisateur de films d’animation né le 29 décembre 1893 à Polaun en Bohême et mort le 13 novembre 1968 à Paris. Il suit des études d'architecture aux Beaux-Arts à Vienne entre 1913 et 1917. En 1920, il s'installe à Berlin et collabore notamment aux films de Lotte Reiniger, dont Le Prince Achmed (1926), ou encore sur le Golem (1920) de Wegener.

En 1929, il s'installe à Paris. Il aménage une caméra multiplane rudimentaire dans les combles du théâtre du Vieux-Colombier grâce au soutien de son directeur Jean Tedesco, et réalise un film d'animation de trente minutes : L’Idée. Cette première œuvre d'une grande poésie, qui s'inspire d'un livre de gravures sur bois de Frans Masereel, est projetée en décembre 1934 au cinéma Studio Raspail à Paris.

Juste avant la Seconde Guerre mondiale, Bartosch entame la réalisation d'un second film d'animation inachevé de 900 mètres sur le cosmos, Saint-François, dont les Occupants détruisent le matériel pendant la guerre. Le réalisateur ne s'en remettra jamais vraiment. Cet acharnement des Nazis est dû aux activités militantes de Bartosch qui dès 1938 réalise, à destination du peuple allemand, des petits films d'animation satiriques de propagande antinazie. A partir de 1952, il retrouve le désir de créer et s'attaque à un troisième film… Mais cet ultime projet n'aboutira jamais car, après huit ans de travail autour des questions de captation de la lumière, sa santé déclinant, Berthold Bartosch l'abandonne.

L’Idée est donc l’unique film connu de ce réalisateur.

Bartosch au travail, Collection AFCA

Technique et mise en scène

L’Idée s'inspire du livre de gravures sur bois de Franz Masereel, "Une Idée" (Die Idee). Les personnages et les décors du film évoquent l'esthétique de la gravure et sont composés de plusieurs couches de différents types de papier, allant du semi-transparent au carton épais. Les effets spéciaux comportent des halos, de la fumée et du brouillard. Ils sont réalisés avec de la mousse de savon étalée sur des plans en verre disposés les uns au-dessus des autres, éclairées sur les côtés. 

La profondeur de champ qu'il crée grâce à sa multiplane pour les décors ou arrière-plans des tableaux successifs qui forment le film, est l'une de ses marques de fabrique, venue du Prince Achmed (1926) de Lotte Reiniger. 

Ce film est également l’occasion d’entendre les expérimentations sonores du musicien Arthur Honegger, figure ascendante de la musique d’avant-garde. Le musicien utilise pour la première fois la combinaison de l’orchestre classique et d’un instrument électronique – les ondes Martenot – dans un film.

Bartosch était un inventeur né et exploite les nouvelles ressources de l’époque, aussi bien par la technique (une camera multiplane inventée par ses soins), par une musique alors que le cinéma est sonore depuis peu, un jeu de surimpressions et une animation non cartoonesque, qui se rapproche plus iconographiquement de l’expressionnisme allemand d'un M le Maudit  (1931), et dans la recherche formelle d’Entr’acte (1924) de René Clair.

L'Idée, papier découpé et la main de Berthold Bartosch, collection AFCA

L'Idée et son contexte

L’Idée est un conte puissant sur la force de l’idéal révolutionnaire, et sur l’incapacité des pouvoirs en place à l’étouffer. Le film connut sa première mondiale à Londres, le 16 décembre 1934, dans le cadre d'une projection de la Film Society au Tivoli Theatre. En France, sa première présentation publique suit de peu celle londonienne et se tient à Paris, au cinéma Raspail 216, le 27 décembre. En Allemagne, il ne pourrait être question de sortir le film : « le roman en images Die Idee a déjà été retiré des librairies : l'œuvre de Masereel fait partie des "ouvrages nuisibles et indésirables" qui, le 10 mai 1933, sont jetés sur le bûcher par les étudiants berlinois. »[1] 

Quant à Bartosch, résidant à Paris et hostile au régime hitlérien, tout comme Frans Masereel dont le livre était imprégné d’un engagement pacifiste et social, il ne pouvait y être que persona non grata.

 À l'ère du règne grandissant des films de Disney, où tout est appelé dessin animé, quelle que soit la technique employée, et généralement destiné aux enfants (ou à la famille), L'Idée, par son propos et sa facture même, ne pouvait qu'attirer l'attention de la critique cinématographique et de spectateurs avertis. L'Idée avait marqué les esprits des cercles d’initiés, mais restait assez méconnue en dehors de ces derniers : dans le cercle des ciné-clubs, et notamment en 1959 au musée Guimet, lors d’une séance du Club de l'Aca (Artistes et amis du Cinéma d’Animation).

Maria Bartosch, femme du réalisateur, entreprend un travail de restauration du film, mais celui-ci tombe gravement malade et meurt en 1968 sans voir la restauration aboutie de son chef d’œuvre.

Dès lors plusieurs présentations en hommage au réalisateur ou à l’illustrateur, vont être organisées. En 1977 il est présenté à Cannes dans le cadre d’une rétrospective sur les pionniers français de l’animation. En 1988 à l’Afca fête dans le cadre de la 6e édition du Festival national du film d'animation, l’AFCA lui rend également hommage lors des 20 ans de sa disparition et des fondateurs du cinéma d’animation, et une nouvelle copie de L’Idée est tirée à cette occasion, accompagnée par la publicité inédite Vie heureuse… Ayant restauré le film dans le cadre du plan de sauvegarde du cinéma du Centre national de la cinématographie, les Archives françaises du film l'ont montré à plusieurs reprises, dans le cadre notamment de deux programmations exceptionnelles tenues à la Cinémathèque française en 2007 et 2009 : la rétrospective « Du Praxinoscope au cellulo – 1892-1948, 50 ans de cinéma d’animation français » (reprise par la Cinémathèque québécoise en décembre 2008) et la célébration de leurs 40 ans.

[1] Joris van Parys, Frans Masereel. Une biographie, Archives et Musée de la Littérature/ Editions Labor, Bruxelles.

L'Idée photogramme

Berthold Bartosch © Collection AFCA

Bibliographie

Bibliographie sélective ayant accompagné l'écriture de ce texte, et pour se renseigner sur Berthold Bartosch.

  • Xavier Kawa-Topor, Philippe Moins, Le cinéma d’animation en 100 films, Paris, Capricci, 2016 (p.35) 
  • Giannalberto Bendazzi, Cartoons- Le cinéma d’animation 1892-1992, Paris, Liana Levi, 1991, (p.66 - 75)
  • CNC, Du praxinoscope au cellulo – Un demi siècle d’animation en France (1892-1948), Paris, CNC, 2007 (p.47)
  • Joris van Parys, Frans Masereel. Une biographie, Archives et Musée de la Littérature/ Editions Labor, Bruxelles.
  • Olivier Cotte, 100 ans de cinéma d'animation, Paris, Dunod, 2015 (p.179)
  • Bulletin ACA n.5 Mars-Avril 1959 " Bertold Bartosh immobile" par André Martin
  • La Lettre mensuelle d'information de l'AFCA, Janvier 1995
  • Biographie de Berthold Bartosch en cours par Marina Feodoroff

Informations pratiques

L’ AFCA est l’unique ayant-droit du film.

La copie est conservée aux Archives françaises du film du CNC.

Format original : 35mm ; autre format disponible : fichier numérique.

Pour toute projection, demande de visuel ou de renseignements, contactez l'Agence du court métrage qui en assure la distribution.

Numéro de visa : 56657 (registre public du cinéma et de l’audiovisuel, RPCA)

Practical details

The AFCA is the only right holder of the movie.

The French movie archives of the National Center of Cinematography and the moving image (Archives françaises du film du CNC) keeps a record of the copy of the original film.

Original 35 mm format, a digital copy is available

For all projection, visual material, or informations related to the movie, please refer to Agence du court métrage which ensures its distibution.

Visa number : 56657 (registre public du cinéma et de l’audiovisuel, RPCA)